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Une fin de semaine qui commence bien. A la gare, décider de céder aux arguments d’un racoleur humaniste de la Croix Rouge. Je signe une autorisation de prélèvement pour me délester de 15 € par mois, pendant 6 mois, un an, une vie ;-). Déductibles à 75 % des impôts, je me sens mieux, plus en phase avec l’époque. Donner plus, alors que la misère va gangréner 2009, … Responsabilité.

 

Et puis avoir un peu de temps pour flâner dans une librairie qui jouxte la gare de Lyon, et tomber sur « La Rose Blanche » d’Inge Scholl. Un livre remarquable, sur six allemands engagés contre le nazisme au nom de leur responsabilité morale. Un ouvrage d’une terrible acuité, édité aux éditions de Minuit. Un professeur, cinq étudiants, héros singuliers qui ont lutté humblement dans une résistance passive, pour réveiller les consciences de leurs contemporains. Des héros singuliers contre la barbarie d’une époque, qui ont payé de leur vie des mots qui signaient un engagement total pour la liberté, broyés par le système fasciste.

« Braver toutes les forces contraires » disait Goethe, une épitaphe commune pour Sophie et Hans Scholl, Cristoph Probst, Willi Graf, Alexander Schmorell, et Kurt Huber. Une belle leçon de vie, que cette lucidité et cette lutte pacifique d’une poignée de jeunes allemands à rebours du National-Socialisme qui baignait leurs jours.

Leur crime : revenus et réveillés des jeunesses hitlériennes, ils ont commencé par douter, puis par s’enflammer contre un système criminel, la révolte et l’indignation incontournables. Embarqués dans une société devenue folle, ils ont lutté comme intellectuels, leur conscience armée d’une machine ronéo pour reproduire une prose de résistance, tractée dans les boîtes aux lettres et les universités allemandes. Un combat à mains nues, disproportionné, qui ne pouvait que tourner mal. Mais Hans, Sophie et les autres, ne pouvaient renoncer à leur responsabilité sans mener ce combat. Il leur fallait lutter à leur échelle, écrire et publier, créer des cercles, tenter de déclencher un basculement à l’intérieur du national-socialisme.

La Rose Blanche, le nom de cet éphémère mouvement de résistance estudiantin d’une université munichoise au début des années 40. Des jeunes de 20 ans pour l’essentiel, qui n’ont pas voulu sacrifier leurs valeurs fondamentales, chrétiennes et humanistes, à l’escroquerie du national-socialisme. Ainsi écrivaient-ils à propos de l’Allemagne et d’eux-mêmes : « La fin sera atroce, mais si terrible qu’elle doive être, elle est moins redoutable qu’une atrocité sans fin ». A méditer.

 

La lecture de La Rose Blanche déclenche bien des réflexions sur l’engagement. Au-delà d’une révolte d’un temps de l’abominable, le livre est porteur de sens pour les combats d’aujourd’hui. « N’oublions pas que chaque peuple mérite le gouvernement qu’il supporte », à chacun de prendre ses responsabilités comme membre de la collectivité des hommes, universelle.

 

Hans, Sophie et les autres sont morts pour la liberté d’expression d’un appel à l’insurrection. Naïfs, ils ont essayé de déciller la bonne conscience tragique de leurs pairs, avec des tracts ronéotypés. Aujourd’hui, cette liberté d’expression occidentale est loin d’être évidente et naturelle dans bien des pays du monde. En usons-nous à bon escient ? Une pensée pour les amis tunisiens, dont internet est muselé pour leur omniprésident Ben Ali… Une motivation renforcée de continuer ce blog.

 

Cette rose blanche me fait penser à la responsabilité des élites dans la faillite sociale et écologique du système capitaliste ultralibéral. Comment autant d’intelligence peut-elle aussi longtemps s’aveugler ? Comment jugera-t-on l’élite de la fin 20ème/début 21ème siècle, qui aura laissé le climat se dérégler pour ne pas remettre en cause certains profits ? Qui aura accepté et servi un modèle de développement insoutenable, par confort et habitude, par gratitude de quelques prébendes ? Appartenir à cette élite ne va pas sans responsabilité, c’est le témoigne de La Rose Blanche. Chacun à son niveau doit se responsabiliser : « chaque homme, pénétré de sa responsabilité sociale, s’unirait à nous pour s’élever contre la domination de la force sur le droit, de l’arbitraire sur la moralité ».

 

Pour conclure ce billet, je ne me lasse pas de la conscience et de la prémonition européenne, que portaient ces jeunes allemands. Prophétique, La Rose Blanche annonçait : « Les peuples européens auront à se connaitre et à s’unir pour jeter les bases d’un relèvement commun… Liberté de parole, liberté de croyance, protection des citoyens contre l’arbitraire des états dictatoriaux criminels, telles sont les bases nécessaires de l’Europe nouvelle ».

  


P.S. : 
La Rose Blanche, livre réédité par les éditions de Minuit en octobre 2008. C’est aussi un film "Sophie Scholl", un film allemand “Sophie Scholl. Die letzten Tage” réalisé par Marc Rothemund sortie en Allemagne en février 2005.

 

 

Tag(s) : #heloim.sinclair
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