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Les citoyens français et néerlandais n’ont pas dis non à l’Europe en général, il ont plutôt dis non à un processus de construction constitutionnelle, qu’ils pensent ne pas devoir accepter, plus au niveau de sa forme que de son contenu, qui d’ailleurs peut être considéré comme plutôt inconnu par la majorité des citoyens. Cela a assurément offert des opportunités dialectiques démagogiques dont certains se sont servis pour iriser les masses au-delà des 50%.

Les allemands n’ont pas eu droit à l’articulation (la constitutions allemande ne prévoit pas de plébiscite par méfiance vis à vis de son propre peuple), mais il est probable qu’un non se serait articulé aussi, vu l’état actuel de la société allemande. D’autres nations ne pratiquent pas de plébiscites non plus, leurs citoyens ne pourront donc pas se faire entendre. Hors, les Français et encore plus les Néerlandais qui sont des peuples européens dotés d’une tradition démocrate avec des citoyens éduqués, libres et plutôt tolérants ont placé un NON apparemment entêté qu’il s’agit d’essayer de bien comprendre sous tous ses aspects. Un sage proverbe hindou dit : « Ne peut exister la colère où règne la compréhension ».

Il y a certes plusieurs raisons pour ce non, en France, au Pays-Bas et dans les autres pays qui risquent de s’accorder. Il s’agit déjà de reconnaître qu’il s’agit d’un refus légitime et correctement adressé à la caste politique. Car les politiciens sont bien à la fois interlocuteurs directs de leurs citoyens ainsi que - dans leur fonction de représentants du peuple - les interlocuteurs directs des institutions européennes ; l’interlocution directe entre les citoyens européens et le gouvernement européen étant quasiment nulle.

Ce NON peut paraître irrationnel, il n’est pourtant rien d’autre qu’une réponse simple à une question bien trop simpliste. Il n’y a pas vraiment eu de discussion avec les citoyens et le grand public quant à l’élargissement démocratique de l’Europe c'est-à-dire par rapport à la question : « Où allons nous avec l’Europe dans ce monde en pleine transformation ». La conséquence est que les peuples européens parmi les plus démocrates et dotés d’un droit d’expression sur la question constitutionnelle ne pas prêts à conférer plus de contrôle à un système qu’ils n’ont jamais eu l’impression de contrôler, et qui pire est, ne semble pas capable de se contrôler lui-même, alors qu’une multitude de nouveaux problèmes assiègent les Européens gâtés de paix et de gavés de bien être.!

Depuis certains temps trop de choses vont trop vite, sans explications pertinentes ni solutions satisfaisantes. Les grandes dernières bornes milliaires européennes dont chacun se souvient sont l’euro qui a coûté cher, les irrégularités en Italie et Grèce concernant les critères de participation à la zone Euro ainsi que les violations constantes des règles dressées, les nombreux scandales de corruption à Bruxelles ainsi que la mauvaise discipline de travail, le « je m’en foutisme » rampant et la quête aux privilèges des délégués européens. Viennent s’ajouter une ouverture de L’Europe effrénée vers l’Est et le Moyen-Orient, apparemment irresponsable par rapport aux anciens citoyens alors que toute l’Europe souffre encore avec l’Allemagne des suites de son indigestion d’intégration de la RDA. De plus, la majorité des nouveaux membres sont admis souvent sans pleinement remplir toutes les conditions d’admission. Les règles dressées pour la sécurité de tous ne sont donc volontairement pas respectées. La peur du chômage, de la pauvreté, de la perte d’acquis sociaux est à voir dans le contexte d’un nivellement incontournable à moyen, long terme des modes de vies et pouvoirs d’achat de tous les citoyens européens, avec des perspectives de croissance à l’Est et au mieux de stagnation à l’Ouest. Pour compléter ce panorama intimidant, le climat de globalisation met L’Europe en concurrence directe avec un géant chinois et d’autres pays émergeants qui forgent leur succès économique sur le non-respect de l’individu. À ne pas parler du siège américain contre la démocratie.

Tout cela fait peur, propage l’insécurité et la perte d’acquis pour lesquels beaucoup de sang a été déversé pendant des centenaires. L’homme simple confronté à cette peur cherche à se sécuriser auprès de personnes dignes de confiance, ce que les politiciens ne semblent plus pouvoir incarner ni transmettre de nos jours. De plus, tout le monde sait que l’Europe n’est pas aujourd’hui un système reposant sur des fondements réellement démocratiques. Loin de l’idéal européen d’origine, les institutions européennes apparaissent aux citoyens plutôt comme monstre kafkaesque en pleine croissance, une pieuvre régulatrice de son propre gré. Nous voulions une Europe petite avec des structures politiques fortes et persuasives dans un monde déchaîné par l’avarice et l’avidité. Et nous nous retrouvons présentement avec une Europe bien trop grande avec des structures politiques démocratiques bien trop faibles pour confronter la perte d’une culture humaniste que voit ce monde globalisé.

Dans ces conditions, dans cet environnement à participation réduite, sans dialogue ni entente du haut vers le bas, soumise à la logique sombre du profit de plus en plus ubiquitaire, quelles raisons devraient avoir les citoyens de l’Europe de l’Ouest qui font partis des peuples les plus éduqués et égoïstes de ce monde d’acquiescer un processus qui leur ôte d’avantage de droits, de sécurité, d’influence directe et qui semble mener directement à la ruine. Face à l’écho futur de cette ruine menaçante, l’instinct existentiel de survie se meut, cette bête appelée « ego » qui est capable des pires atrocités pour s’entretenir et se justifier. Pour apaiser cette bête égotiste par le bon sens, nous n’avons comme instrument que l’attention, le dialogue et la compréhension mutuelle.

Ce NON apparaît comme frein de secours activé par ceux qui en ont les moyens et qui s’en sont rendu compte à temps, pour ralentir un train effréné à destination inconnue et incomprise. Dans ce sens, ce NON peureux peut être considéré comme une réaction nerveuse contre la menace d’un nouvel absolutisme capitaliste et technocrate, qui se montre de moins en moins gêné de prendre le monde par la force. Ce NON est une sommation vers les politiciens d’engager le dialogue, d’expliquer et de synchroniser leurs visions politiques avec celles des citoyens. L’entrée dans une nouvelle ère de responsabilité globale et personnelle doit être supportée sur base démocratique par une majorité des européens libres et éduqués. Et si les peuples de l’Europe de l’Ouest ne devaient pas encore avoir compris l’enjeu, et bien il faudra s’investir avec les moyens de la démocratie pour leur expliquer les réelles nécessités existentielles.

Pour cela, la caste politique devra se fonder sur les vrais idéaux chrétiens de L’Europe, que sont le respect des autres, le dialogue, l’équité, la communauté et le partage dans un cadre démocratique pour lequel des centaines de millions d’hommes ont déjà sacrifié leur vie. Cet héritage est de taille et ne peut être immolé sur l’autel d’une rapidité globale irréfléchie et harcelante, qui pense pouvoir gagner de vitesse les peuples pour maximiser les profits d’une minorité capitaliste au volant et qu’on voit ardemment convoiter ses propres intérêts, privilèges et profits. Ce NON nous donne un petit de temps de réflexion face aux nombreux défis auxquels nous nous voyons confrontés. Ce NON force les politiciens à concevoir plus de transparence et à cultiver le dialogue avec leurs citoyens, pour que des solutions démocratiques et équitables puissent voir le jour et nous mener vers un futur plus sage et plus en accord avec les anciens idéaux de notre civilisation. L’Europe semble aujourd’hui la seule garante survivante de démocratie et de liberté dans une ère turbo capitaliste confuse où ces valeurs risquent le sacrifice sur l’autel de la quête subversive au profit, contre le bon sens, l’âme et l’amour.

Même s’il faut faire vite aujourd’hui dans ce monde globalisé en course folle, je pense que la solution continue de résider dans l’aspiration et la manifestation d’une moralité européenne forgée par de nombreuses guerres égoïstes et qui idéalise le compromis et la réconciliation de nos nombreux intérêts civiques communs. Il ne faut pas créer ni accepter des faits accomplis, il faut que nous assumions nos responsabilités et entrions dans un dialogue multilatéral ouvert avec nos dirigeants pour un futur sain. Pour cela il faudra prendre au sérieux la peur et le bon sens des citoyens, même si le freinage du projet de constitution Européen est fâcheux et semble paradoxe.

Un doute a été semé, un doute qui nous engage à poursuivre notre travail pour la démocratie (…en attendant une meilleure forme d’organisation sociétale) et contre l’absolutisme des faits (économiques) accomplis qui se passe de dialogue. Les Européens ont une chance que la majorité des autres citoyens du globe n’ont pas : Celle de s’articuler sans entrer en guerre, même si comme dans le cas présent on articule qu’on a pas compris vers où va le train, et que par conséquent on est pas près de monter à bord. Les temps où des trains emportaient des Européens vers l’Est à destinations inconnues sont révolus. Aujourd’hui les citoyens français et néerlandais ont semé le doute, qui engendrera la réflexion, le dialogue et le désir de faire encore mieux. Chaque malheur comporte une chance, celle d’élaborer ensemble une destination réaliste et prometteuse, non seulement pour les Européens, mais en définitive pour les milliards d’opprimés sans droit à la parole et sans opportunité de changer la face du monde humain pour le meilleur.

Signé : Père Truc d’Allemagne
Tag(s) : #heloim.sinclair
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